Un petit billet de nostalgie, s’il vous plaît ! Après la disparition des fameuses bornes jaunes, voici venir le tour des guichets SNCF. Pendant que la fréquentation explose dans les TER, le service humain, lui, tire sa révérence. Entre choc, chiffres et débats sur le service public, voyons comment la France des petites gares s’apprête à changer de visage.
La vague de suppressions : guichets en voie de disparition
L’actualité ferroviaire a des allures de coup de massue pour les habitués des petites gares régionales. En Région Sud, 26 gares perdront leurs guichets avec présence humaine dès septembre 2025. Suivront, à partir de janvier 2026, 13 gares du Grand Est. En Hauts-de-France, c’est une quarantaine de suppressions de postes ou de contrats d’intérimaires qui est en cours. Même la Nouvelle-Aquitaine n’est pas épargnée, avec les guichets de Royan, Cognac et Saintes sur la sellette. Autant dire que l’hémorragie est nationale et que la SNCF semble jouer à cache-cache avec le contact humain !
Pourquoi cette vague de disparitions ? Les responsables l’assurent : le numérique a pris le dessus. Plus de 80 % des billets sont désormais achetés en ligne. Les chiffres le confirment : en Grand Est, les ventes de billets aux guichets sont passées de 31 % en 2019 à seulement 11 % en 2024. La technologie a-t-elle donc envoyé le guichetier à la retraite ?
Le paradoxe des gares bondées et des guichets désertés
Un détail interpelle : entre 2023 et 2024, la fréquentation des TER a bondi de 10 %. Les trains se remplissent, les quais s’agitent… mais la SNCF supprime la présence humaine. C’est à s’y perdre : plus il y a de monde, moins il y a de personnel. Les syndicats crient à l’aberration. Sud Rail souligne : pourquoi réduire l’offre humaine alors que la demande explose ? Pour eux, c’est une « casse organisée des services publics ».
Selon Thibaud Philipps, vice-président chargé des transports au Grand Est, l’explication est purement comptable. Les 13 prochains guichets à fermer ne réalisent que 6 à 10 ventes par jour, générant à peine 8 000 euros par an, bien loin des 200 000 euros de coût par guichet. Bref, la rentabilité a eu, là aussi, le dernier mot.
Des alternatives… mais pas pour tous ?
La suppression des guichets n’arrive pas sans un plan B. En Région Sud, la SNCF mise sur des alternatives :
- espaces ZOU! et guichets mobiles,
- partenariats avec les buralistes et la Poste,
- possibilité d’achat dans la quasi-totalité des gares (96 % selon la Région Sud).
Pour les usagers connectés, rien à redire. Mais pour les autres ? Ceux qui n’ont jamais touché un clavier ou qui se fichent éperdument d’internet (et il n’y a pas que des seniors dans ce cas, avis aux idées reçues), le service humain avait pourtant du bon : conseils, réconfort, lien social, et un billet découpé avec le sourire. Ici, la CGT Cheminots s’insurge : « le guichetier, c’est aussi un maillon de la cohésion territoriale, un repère pour les plus fragiles ». Elle réclame une « réhumanisation des gares ».
Et pour les allergiques au numérique ? La parade, c’est d’aller chez le marchand de journaux du coin pour un billet. Encore faut-il qu’il reste dans le village un commerce partenaire…
Un modèle de service public en débat
Derrière la suppression des guichets, deux visions du service public s’opposent :
- La première, menée par la SNCF et les régions, défend la rationalisation : il faut s’adapter aux usages, optimiser les coûts, et rien ne sert de garder des guichets vides.
- L’autre, portée par les syndicats, rappelle qu’un service public, ce n’est pas qu’une histoire de chiffre d’affaires ! Le contact humain, l’accessibilité pour tous, la sécurité dans les petites gares désertées… tout cela n’est pas négociable.
La sécurité, justement, inquiète. Des petites gares vides, c’est, pour certains usagers, la porte ouverte aux accidents ou aux agressions, surtout si un simple souterrain se fait désirer.
Conclusion : Vers un monde sans guichetiers ?
Le train file à grande vitesse vers le tout numérique, mais tout le monde n’a pas acheté son billet pour la modernité. Il ne s’agit pas d’être technophobe : les chiffres montrent un vrai changement d’habitude. Mais sans guichet, c’est un pan de l’histoire du rail, et surtout une part du service au public, qui disparaît. Peut-être faudrait-il rappeler, avec un brin d’ironie : dans « service public », le mot important n’est-il pas « public » ? Avis à tous ceux qui aiment le contact humain – et à tous les amoureux de la guérite qui sent bon le papier et la conversation.

Victor Beaumont est un grand passionné de voyages et de mobilité, avec une affection toute particulière pour les trains. Depuis son enfance, il aime observer les locomotives, découvrir de nouvelles lignes ferroviaires et s’intéresser aux innovations qui transforment nos déplacements. Pour Victor, le voyage ne se résume pas à la destination : c’est l’expérience du trajet qui compte. Dans ses articles, il partage cette passion en proposant des idées pour voyager malin, comparer les moyens de transport et redonner au train la place qu’il mérite dans notre quotidien.





