Trains gratuits pour 48 millions de voyageurs en Espagne : pourquoi la France refuse

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Trains gratuits pour des millions de voyageurs en Espagne : la France sur le quai de la prudence

Quand l’Espagne fait voyager… gratuitement !

Vous avez bien lu : en Espagne, les trains de banlieue, liaisons régionales et trajets de moyenne distance de la Renfe seront gratuits du 1er septembre au 31 décembre 2022. Une annonce retentissante du gouvernement espagnol, qui a décidé de faire voyager sans payer sur quantité de lignes fréquentées chaque mois par près de 48 millions de déplacements. L’objectif est triple : inciter l’utilisation des transports publics en pleine flambée des prix de l’énergie et du carburant (beaucoup de portefeuilles espagnols disent merci !), atténuer pour les familles les effets d’une inflation record (10,8 % en juillet sur un an) et, cerise sur le gâteau, contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique.

Un ticket gratuit pour quels résultats ?

Généreux, c’est certain. Mais les conséquences ? Plusieurs experts interrogés par le média en ligne Público s’interrogent sur les risques de saturation du réseau ferroviaire. Logique : quand c’est gratuit, on grimpe plus facilement dans le train ! L’augmentation de la fréquentation à la rentrée ne fait guère de doute selon eux. D’ailleurs, nos amis allemands pourraient déjà donner un coup de sonnette d’alarme…

L’exemple allemand : succès populaire, gares débordées

En effet, l’Allemagne a tenté l’expérience « transports abordables » à partir du 1er juin 2022, en rendant accessibles trains régionaux et transports municipaux pour un ticket mensuel de seulement 9 €. Mission quasi impossible pour les collectionneurs de pièces rouges, tant le succès a été immédiat : 21 millions de tickets à 9 € vendus rien qu’en juin, selon la Fédération des entreprises de transport (VDV). On constate alors une hausse nette de la fréquentation des transports en commun, d’environ 10 %, surtout pour les loisirs (coucou les week-ends à la plage !), précise Christian Winkler, de l’institut spécialisé DLR, à RFI.

  • Plus de voyageurs dans les trains ;
  • Mais pas plus de trains mis à disposition (autant tenter d’ajouter des wagons avec du scotch…)
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Résultat : un joyeux chaos dans certaines gares, nécessitant un renfort d’effectifs et de rames annoncé pour l’été par la compagnie ferroviaire allemande. Mais, revers de la médaille, la pérennité de la mesure a vite été écartée par le ministre libéral des Finances : l’opération, évaluée à 3 milliards d’euros et entièrement financée par l’État, ne pourra pas être prolongée indéfiniment.

La France, prudente… et centrée sur ses priorités

Voyager sans payer en France ? Interrogé le 26 juillet par une députée LFI à l’Assemblée nationale, le ministre des Transports Clément Beaune a écarté l’idée, en invoquant la nécessité de « choisir des priorités ». Certes, selon l’Insee, le prix des billets de train a grimpé de 14,6 % en moyenne entre avril 2021 et avril 2022, et même de 15,3 % entre janvier et avril de cette année. De quoi faire grincer quelques dents après deux ans particulièrement tendus pour le porte-monnaie.

Mais en France, les infrastructures ferroviaires réclament des investissements colossaux : 100 milliards d’euros sur quinze ans, estime le président de la SNCF Jean-Pierre Farandou. Autant dire qu’avant d’ouvrir en grand les portes de la gratuité, il faudra sûrement rénover, moderniser et fiabiliser le réseau. Clément Beaune l’a dit : la priorité, c’est de réinvestir dans les transports du quotidien, même si le sujet de la tarification reste sur la table.

  • Trois quarts des billets bénéficient déjà de cartes de réduction ou d’autres avantages, selon le ministre.
  • Des pistes de réflexion sur l’accessibilité et le prix des voyages restent ouvertes avec la SNCF, promet-il.

En résumé, pendant que l’Espagne tente le pari du train gratuit face à une inflation galopante, la France s’offre un billet plus modéré, préférant miser sur l’amélioration et la pérennité de son réseau. L’expérience allemande, elle, rappelle que la générosité doit s’accompagner d’infrastructures solides… et de wagons en plus ! Vous voilà prévenus : avant de réclamer un trajet offert, il va peut-être falloir, en France, attendre le prochain train (et espérer qu’il soit à l’heure…).

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